Dans cette société de l’accusation perpétuelle et de l’expiation tapageuse qui arraisonne à tour de bras les fameuses heures les plus sombres de notre histoire, je me prends parfois à rêver d’une mémoire sans oriflamme ni destrier, d’une mémoire pédestre, modeste, discrète, silencieuse ou qui ne fasse pas d’autre bruit que les pages que l’on tourne dans le colloque singulier de la lecture.
Comment parler de la Shoah sans tout mélanger ni sacrifier les exigences du jour ? Quelles leçons tirer de cet événement proprement incroyable ? Comment penser le mal, la radicalité du mal, la banalité du mal, l’industrialisation du mal, sans abandonner au mal tout l’espace de l’immortalité ? Ces dialogues que voici sont nés de ces interrogations et de ce scrupule. »
Alain Finkielkraut