« Les moines se présentent souvent comme des chercheurs de Dieu. J'ai bien le droit de dire aussi que j'ai trouvé quelqu'un et que je l'aime, là dans ma vie, dans ma chair, et dans l'histoire du monde. Et cette foi, cette présence unifie mon être, mon intelligence, mes passions, mon goût de vivre. Ma foi au Christ est une foi au Verbe fait chair, uni à l'homme dans sa chair, dans tout ce que la chair éprouve, et dans sa finitude même, en une noce stupéfiante entre la lumière de la Vie et l'humanité charnelle qu'il a créée pour se la donner et la transfigurer en lui. Je tiens plus que tout à ce christianisme de la chair, au Christ Parole faite chair et chair devenant Parole de Dieu, Parole de Dieu devenant parole d'homme. Parce que je m'éprouve moi-même comme une chair qui parle, et Dieu est là, dans la personne du Christ. À l'eucharistie, ma chair s'unit à sa chair, et cette communion irradie mon être et me promet à la résurrection de la chair. J'aime passionnément la vie des hommes alors même que j'approche du moment où je devrai la quitter. Seul le Christ m'a permis d'accéder à Dieu sans rien abandonner de tout ce qui fait ma vie, mais plutôt en son coeur même. »