Prophètes du dialogue islamo-chrétien
Maurice borrmans
La longue histoire des relations entre chrétiens et musulmans, depuis les origines de l'islam, a connu bien des étapes difficiles où n'ont pas manqué conflits ou malentendus, propos polémiques ou échanges apologétiques. Elles ont toujours connu des dimensions à la fois religieuses, culturelles, économiques et politiques. En 1965, la promulgation de la Déclaration « Nostra Aetate » du Concile Vatican II sur les Relations de l'Église avec les religions non chrétiennes a fait, pour beaucoup, l'effet d'une heureuse surprise. Et pourtant, si ce texte reflète une nouvelle manière d'apprécier la foi des musulmans et d'évaluer positivement le contenu de leur islam, cela est en partie le résultat des enseignements et des publications de certains chrétiens d'avant-garde qui en avaient préparé les voies, plusieurs années auparavant. Ils s'appellaient Louis Massignon, Jean-Mohammed Abd-el-Jalil, Louis Gardet et Georges Anawati : véritables « précurseurs du dialogue islamo-chrétien », ils avaient su faire connaître à leurs frères en Jésus-Christ les « aspects intérieurs de l'islam ». Par leur témoignage et leur engagement, ils avaient renouvelé le regard chrétien sur l'expérience spirituelle des musulmans, surmontant ainsi les « nombreuses dissensions et inimitiés surgies entre les chrétiens et les musulmans » au cours de l'histoire. Avec bien d'autres, ils s'étaient efforcés sincèrement à « la compréhension mutuelle », tout en agissant, chacun dans son domaine, afin de « protéger et promouvoir (avec leurs amis musulmans) pour tous les hommes, la justice sociale, les valeurs morales, la paix et la libert?, sans oublier les dépassements mystiques auxquels tendent les meilleurs d'entre eux.