Philosophies de l'action catholique
Jean-hugues soret
Philosophies de l'Action catholique ? L'Action catholique a-telle seulement développé une pensée philosophique un peu consistante ? Alors plusieurs ! En 1956 disparaît l'ACJF (Association catholique de la jeunesse française), organisation du mouvement social catholique, née en 1886, et qui fédérait depuis 1929 les mouvements de jeunesse d'Action catholique. L'auteur montre que, lorsque les principaux protagonistes de la crise, Mgr Guerry, pour l'épiscopat, et André Vial, issu de la JAC (Jeunesse agricole chrétienne), pour les responsables de l'ACJF, s'affrontent sur des termes tels qu'évangélisation, apostolat ou humanisation, il ne s'agit pas d'une simple querelle de mots. Cela traduit deux conceptions de l'Action catholique, mais surtout deux conceptions du rapport de l'Église au monde moderne. Les termes de ce débat ne surgissent pas par hasard, ils trouvent leur cohérence dans le thomisme de Jacques Maritain pour l'évêque et dans la philosophie de l'action de Maurice Blondel pour le jeune responsable. Cet affrontement n'est pas une lointaine conséquence des thèses des maîtres, il a déjà existé entre eux et il a vu chacun rester sur des positions antagonistes. Aujourd'hui, ces deux philosophies restent les « matrices intellectuelles », irréductibles l'une à l'autre, dans lesquelles la très grande majorité des catholiques actifs pensent leur engagement dans l'Église comme dans le monde.
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The Philosophy of Action Catholique? Does Action Catholique really have a consistent philosophical system? Then it must have several! In 1956, the ACJF (Association catholique de la jeunesse française), a Catholic social organisation created in 1886 which had federated the youth movements since 1929, disappeared. The author shows that, when the main actors of the crisis - Mgr Guerry representing the episcopacy, and André Vial from the JAC (Jeunesse agricole chrétienne) representing the direction of the ACJF - disagreed on terms such as evangelisation, apostolate or humanisation, it was not simply a quarrel of words. Their conflict was the result of two conceptions of Action Catholique, but above all of two different conceptions of the Church's relation with the modern world. The terms of the debate were not chosen by chance they draw their meaning from the Thomism of Jacques Maritain for the bishop, and Maurice Blondel's philosophy of action for the young director. Their confrontation is not a vague consequence of the masters' theses, it existed previously between them and caused them to camp on antagonistic positions. Today, these two irreconcilable philosophies remain the ‘intellectual templates' within which the great majority of active Catholics think their engagement in the Church and in the World.