Alain Rémond nous parle de ses engagements de toujours, des idées qui le portent, confrontées à l'épreuve du réel, du temps qui passe et des changements de mentalité. Cela sous la forme d'un dialogue avec soi-même, dans une interrogation passionnée que traduit bien le titre : Que sont tes rêves devenus ?Alain Rémond a d'abord été catholique, on le sait. Il ne l'est plus, mais reste obstinément fidèle à ses premiers enthousiasmes, aux deux événements fondateurs que furent pour lui Vatican II et Mai 68. Première révélation : à dix-huit ans, il arrive au Québec pour faire son noviciat dans la communauté de Sainte-Croix (il veut devenir prêtre), mais c'est précisément le moment où éclate la « révolution tranquille », le Québec vomit ses curés et entame une mue accélérée. On l'envoie alors étudier à Rome, il y découvrira surtout la contestation à l'université, la lutte pour les droits civiques et Bob DylanC'est ce jeune homme qui a chanté We shall overcome que nous verrons, au fil des pages, chercher à s'accomplir sans se trahir. Il s'engage dans les rangs du PSU, choisit de suivre l'homme qui incarne à ses yeux la morale en politique : Michel Rocard, dont il sera un temps l'un des conseillers. Cependant le vent tourne, c'est bientôt l'affreuse vulgarité des années 1980 qui déferle sur le pays, incarnée par la privatisation de TF1. Alain Rémond gagne l'amitié d'innombrables anonymes à travers ses chroniques « Mon oeil » de Télérama, entre férocité et humour. Le journalisme devient l'autre nom de son engagement, sa discipline quotidienne. Et la condition de son bonheur. Car ce livre est un livre heureux, qui nous donne en partage quelques moments rares (ne manquez pas la dernière page, bouleversante, sur un certain discours improvisé de Mitterrand). Alain Rémond au meilleur de lui-même.